© Miriam Ruisseau |
En Andalousie coule un fleuve majestueux, le Guadalquivir.
Il est moins connu que l’Èbre, mais tout aussi mythique pour des raisons, disons plus littéraires.
Jamais je ne me suis senti de racines nulle part, mais les ai trouvées là, violemment. Je n’avais pas prévu.
Alors, fascinée par la culture multiséculaire de ce bout d’Europe aride, je suis partie de la source de ce Río Grande improbable, qui naît timidement dans la Sierra de Cazorla, court dans la montagne pour atteindre la plaine, traversant Córdoba, Sevilla, pour s’épuiser enfin dans l’Atlantique, à Sanlúcar de Barrameda, d’où partirent jadis Christophe Colomb et Magellan…
Mais les ondes de cet ancien Bétis charrient davantage que les souvenirs de ces illustres navigateurs ; elles vibrent à l’unisson des rythmes flamencos et des vestiges arabo-judéo-andalous, mémoire liquide de ces temps bénis de tolérance où l’harmonie était possible, la grandeur partagée, l’art et le savoir célébrés.
Et puis le poète Machado est là, présent en toute pierre, derrière chaque arbre ; un peu plus loin Lorca fait encore tressaillir les cyprès qui l’ont vu mourir, la poésie illumine les pas du promeneur attentif et patient, le ciel est ouvert et les hommes sont des rocs. Et ce paysage idyllique mais rude parle bien de la fragilité du monde ; son sol est crevassé, ses veines de plus en plus exsangues, son écosystème menacé. Le désert avance et assèche les terres, assoiffe les chevaux, alourdit le vent.
J’ai peut-être choisi de travailler avec une chambre 4x5’ pour tenter d’arrêter le temps, voire de le défier, en utilisant le procédé Polaroid. Car espérer (au double sens espagnol d’espoir et d’attente) pendant des heures que la lumière devienne douce et ne rapporter qu’une image unique et fragile que la moindre rayure pouvait altérer relève d’un paradoxe qui continue de mûrir en moi. Comme si j’avais voulu tricoter l’éphémère, voire l’accidentel pour mieux embrasser l’intemporel et m’y retrouver, peut-être, en inventant des origines au monde, des réponses à mes pas dans la poussière des chemins.
Míriam RUISSEAU
Jamais je ne me suis senti de racines nulle part, mais les ai trouvées là, violemment. Je n’avais pas prévu.
Alors, fascinée par la culture multiséculaire de ce bout d’Europe aride, je suis partie de la source de ce Río Grande improbable, qui naît timidement dans la Sierra de Cazorla, court dans la montagne pour atteindre la plaine, traversant Córdoba, Sevilla, pour s’épuiser enfin dans l’Atlantique, à Sanlúcar de Barrameda, d’où partirent jadis Christophe Colomb et Magellan…
Mais les ondes de cet ancien Bétis charrient davantage que les souvenirs de ces illustres navigateurs ; elles vibrent à l’unisson des rythmes flamencos et des vestiges arabo-judéo-andalous, mémoire liquide de ces temps bénis de tolérance où l’harmonie était possible, la grandeur partagée, l’art et le savoir célébrés.
Et puis le poète Machado est là, présent en toute pierre, derrière chaque arbre ; un peu plus loin Lorca fait encore tressaillir les cyprès qui l’ont vu mourir, la poésie illumine les pas du promeneur attentif et patient, le ciel est ouvert et les hommes sont des rocs. Et ce paysage idyllique mais rude parle bien de la fragilité du monde ; son sol est crevassé, ses veines de plus en plus exsangues, son écosystème menacé. Le désert avance et assèche les terres, assoiffe les chevaux, alourdit le vent.
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J’ai peut-être choisi de travailler avec une chambre 4x5’ pour tenter d’arrêter le temps, voire de le défier, en utilisant le procédé Polaroid. Car espérer (au double sens espagnol d’espoir et d’attente) pendant des heures que la lumière devienne douce et ne rapporter qu’une image unique et fragile que la moindre rayure pouvait altérer relève d’un paradoxe qui continue de mûrir en moi. Comme si j’avais voulu tricoter l’éphémère, voire l’accidentel pour mieux embrasser l’intemporel et m’y retrouver, peut-être, en inventant des origines au monde, des réponses à mes pas dans la poussière des chemins.
Míriam RUISSEAU
Galerie Nadar - Médiathèque André Malraux de Tourcoing
Du 30 mars au 1er juin 2019
VERNISSAGE DE L'EXPOSITION
LE SAMEDI 30 MARS A 11H30
LE SAMEDI 30 MARS A 11H30